Challenge Upro-G – janvier 2023 – une cloche

~ Les cloches de Tigné ~

 Construite de 1860 à 1863, l’église de Tigné (Maine-et-Loire) a été conçue par l’architecte Ernest François DAINVILLE (1). Le gros-œuvre est en falun et pierre de taille, son plan est classique, en croix latine.

 On compte trois cloches en son clocher : une petite, nommée Agathe, et deux plus imposantes, Marie Raymonde et Édouard-Marie.

Église Saint-Pierre de Tigné (Maine-et-Loire) – (photo personnelle)

 La plus mystérieuse des trois, et aussi la plus petite, se nomme Agathe.

 On ne sait pas comment et par qui elle est arrivée à Tigné. Avant qu’elle soit donnée à la paroisse, la petite histoire raconte, qu’à la Révolution, un paysan vendéen l’aurait cachée pour qu’elle ne soit pas détruite (2).

 Elle est en bronze, mesure 76 cm de haut, 69 cm de diamètre et pèse 190 kilos. Y sont représentés un saint évêque, une Vierge à l’Enfant et une petite croix. Elle a été fondue en 1769 par L.VOYZAIN et N.KAREY (ou N.BARET, selon les sources). Elle est classée et inscrite aux monuments historiques depuis le 10 juillet 1987 (3).

Cloche Agathe (Photo B.Rousseau © CD du Maine-et-Loire – Service de l’Inventaire du Patrimoine – référencée 1986-49-1689 X)

 Comme toute cloche, elle a été bénie et nommée, une inscription sur son vase supérieur en témoigne :

Inscription placée sur le vase supérieur de la cloche (Extrait de la fiche Inventaire IM49001209 complément de la fiche Palissy PM49003209 – Service de l’Inventaire du Patrimoine)

 Le premier protagoniste est le curé ayant béni la cloche. Mais dans quelle paroisse ? En 1769, Antoine-Nicolas de LA COUX DE MESNARD officie au moins à Saulnay et à Mézières-en-Brenne, dans l’Indre. Malheureusement, il n’y a aucune trace de l’acte de bénédiction de la cloche Agathe dans les registres paroissiaux.

Signature de LA COUX de MESNARD curé (extrait d’un acte – AD 36, État civil, Mézières-en-Brenne, 1763/1772, cote 123/AC 02, vue 130 sur 223)

 Viennent ensuite le parrain et la marraine d’Agathe : Alexis Bruno Étienne de VASSÉ et Agathe Mathurine Anne de VASSÉ, nommés tous deux avec les titres qu’ils possédaient déjà en l’an 1769.

 Ils sont frère et sœur, issus de la famille de VASSÉ, famille française originaire du Maine (4).

 Alexis Bruno Étienne de VASSÉ sera entre autres au cours de sa vie, marquis de VASSÉ, vidame du Mans, lieutenant-général des armées du Roi, commandeur de l’ordre royal et militaire de Saint-Louis, député aux états généraux de 1789 (5).

 Le 19 juillet 1774 à Azay-le-Rideau, on les retrouve tous deux dans l’acte de bénédiction de deux autres cloches, lui, parrain de la première, elle, marraine de la seconde, encore nommée Agathe.

Extrait de l’acte de bénédiction de cloches du 19 juillet 1774 (AD 37, État civil, Azay-le-Rideau, Baptêmes Mariages Sépultures, 1774, cote 6NUM6/014/070, vues 19 et 20 sur 29)

« hault et puissant seigneur messire alexis bruno étienne de vassé marquis de vassé et meziers en breinne seigneur des notz, [ ] de montesson, capitaine a la suite de la cavalerie et haute et puissante dame adélaïde euphémie geneviève de vassé [ ] parain [ ] de la grosse cloche [ ] nommée geneviève »

 Alexis de VASSÉ est aussi accompagné ici par son autre sœur, Adélaïde de VASSÉ.

Extrait de l’acte de bénédiction de cloches du 19 juillet 1774 (AD 37, État civil, Azay-le-Rideau, Baptêmes Mariages Sépultures, 1774, cote 6NUM6/014/070, vues 19 et 20 sur 29)

« haute et puissante dame agathe mathurine anne de vassé baronne des baronnies de la roche mabille et de guls, dame de cette paroisse, des chatellenies de l’isle savari et marteaux, des prevotés de clion [ ] veuve du hault et puissant seigneur messire jean baptiste françois joseph, comte de ros, baron de cabereins, seigneur de paralda, montalba [ ] capitaine des carabiniers au régiment de monseigneur le comte de provence [ ] maraine de la petite cloche qu’ils ont nommée agathe »

 Les deux autres cloches, Marie Raymonde et Édouard-Marie, ont eu deux « naissances » : il y a les anciennes, puis les nouvelles cloches.

 Les cloches d’origine ont été fondues par la fonderie Bollée du Mans en 1847 et 1848 (6). Cette manufacture a alors deux sites, un premier à Saint-Jean-de-Braye près d’Orléans (à partir de 1838), et un second au Mans (créé en 1842) (7).

 Comme pour Agathe, Marie Raymonde et Édouard-Marie possèdent des inscriptions de bénédiction.

Extrait du document « les cloches de Tigné » (2)

 Dans le cimetière de la commune, face à la chapelle Sainte-Anne, un monument est « élevé par la reconnaissance des habitants de Tigné à Mr Benjamin VIVION vicaire à Tigné de 1834 à 1840 curé de 1840 au 1 mars 1872 il était aimé de Dieu et des hommes LCCL XL V.I priez Dieu pour lui ».

 Les deux parrains des cloches, MM. le marquis Marie de CONTADES, conseiller-général du département du Maine-et-Loire, et Édouard POITOU, maire de la commune de Tigné, seront également présents le 14 mai 1860 lors de la bénédiction de la première pierre de la nouvelle église Saint-Pierre (8).

Monument et plaque – Benjamin VIVION (photos personnelles)

 Au début du XXIème siècle, on constate qu’une des cloches est fêlée et que l’autre est usée sur les bords. Tout d’abord évoquée, la restauration par l’entreprise Bodet Campanaire à Trémentines est abandonnée car plus couteuse qu’une refonte.

 Cette refabrication des cloches à partir des anciennes sera faite par la fonderie d’origine (Bollée), mais sur le site de Saint-Jean-de-Braye dans le Loiret.

 La première cloche, la plus grosse des deux, Marie Raymonde, a un « son parfait » du premier coup. Son électrification est confiée à M.GOUJON, travaillant avec la fonderie Bollée.

 Par contre, le son de la seconde cloche n’est pas bon, il faut la refaire. Ceci explique l’année de décalage entre les deux cloches. C’est l’entreprise de Trémentines qui se chargera de l’électricité de cette dernière.

Vues des deux cloches dans l’église de Tigné (photo personnelle – 16 avril 2006)

 La bénédiction des nouvelles cloches s’est déroulée le dimanche 16 avril 2006, jour de Pâques.

Cloche MARIE RAYMONDE (photo personnelle – 16 avril 2006)

« L’an 2005, j’ai été bénite pour l’église de Tigné, par le père GAUTREAU curé, MARIE RAYMONDE, en présence de Mme Suzanne BRUCY maire de Tigné, en présence de Mr Maxime CHALOPIN correspondant paroissial à Tigné »

Cloche ÉDOUARD-MARIE (photo personnelle – 16 avril 2006)

« L’an 2006, j’ai été bénite pour l’église de Tigné, par le père GAUTREAU curé, ÉDOUARD-MARIE, en présence de Mr Benoît ONILLON maire de Tigné, en présence de Mr Maxime CHALOPIN correspondant paroissial à Tigné »

Sources :